Rencontre fortuite ? [PV Mlle des Oeillets]

*Alban ne savait plus où donner de la tête. L'entretien qu'il avait eu avec ma favorite du Roi, Madame de Montespan, quelques jours auparavant, n'avait pas eu le résultat escompté. Malgré toutes les notes qu'il avait prises, pas le moindre indice à se mettre sous la dent, pas la moindre piste à suivre. Le métier d'enquêteur était bien dur.

Il en avait parlé à La Reynie. Son supérieur, tout aussi embêté, lui avait cependant conseillé de ne pas lâcher prise, et l'avait encouragé à poursuivre ses recherches dans les recoins de Versailles, histoire de s'habituer à un autre monde que celui des bas-fonds. Mais Alban n'était pas sot : de par ses origines modestes, jamais il n'aurait de reconnaissance aussi importante. Il avait déjà eu de la chance d'être recruté dans une institution aussi prestigieuse. Il ne fallait pas trop en demander.

Les suspicions envers le Chevalier de Lorraine n'avaient pas trop évolué. Et son exil n'aidait pas tellement à l'enquête. Mais pour le moment, ce n'était pas son problème. Alban avait à faire avec un problème plus local : le trafic de divers objets et rites pour les moins horribles. La liste de noms trouvée chez un suspect ne quittait pas son carnet bien rangé dans sa poche. Certains noms étaient connus à Versailles. C'était donc un bon endrot où chercher.
Il se faisait discret. Mais par précaution cette fois, il avait soigné sa tenue. Inutile d'attirer l'attention sur lui. Il lui fallait avant tout être subil pour pouvoir dénicher la moindre information.
Mais qui pourrait la lui donner, cette information ? Il ne pouvait pas se permettre d'interpeller n'importe quelle personne. Non... Il devait essayer avec ceux dont on se méfiait le moins, mais qui avaient toujours l'oreille partout. Un domestique ferait parfaitement l'affaire. Restait à tomber dessus.*

Sans le savoir, Claude allait être la domestique qui allait "servir" les intentions du séduisant policier. Elle était plongée dans ses pensées, recomptant mentalement le nombre de potions achetées à la Voisin, les dernières recommandations de la marquise, les divers rendez-vous auxquels elle devait être présentes etc... Elle pensait aux détours qu'elle devait à présent faire pour ne pas se faire remarquer, elle planifiait ses futurs itinéraires qui devaient changer chaque fois qu'elle se rendait chez l'ensorceleuse, calculait combien de temps elle devrait encore économiser avant de pour s'acheter de nouvelles parures de bals, car sa maîtresse la laissait parfois libre lors de soirée d'appartement et ou de bals, et elle se parait alors de se plus eau atours et se fondait dans la masse des courtisans, dansait parfois avec quelques uns, puis s'esquivait avant la in de la soirée. Pour l'heure, elle marchait d'un pas pressé dans les couloirs de Versailles quand elle rentra dans quelqu'un. Elle releva aussitôt la tête et reconnut le jeune policier qui avait failli causer inconsciemment sa perte et celle de la favorite. Elle inclina légèrement le buste pour le saluer.

-Je vous prie de m'excuser Monsieur, je ne vous avais pas vu.

*Restait à tomber dessus... Pour le coup, c'était elle qui lui était rentré dedans. Alban aurait dû faire attention. S'il était vrai que les Courtisans marchaient lentement et sans se presser, ce n'était pas du tout le genre des domestiques qui couraient à droite et à gauche pour répondre aux besoin de chacun. Il s'en souviendrait pour la prochaine fois.
Il se remis d'aplomb avant de mieux voir qui avait failli l'envoyer au tapis. Il fut surpris de reconnaître la jeune domestique qu'il avait aperçu chez Madame de Montespan. Déjà son entrée avait été fracassante... ce devait être une habitude chez elle. Il lui sourit légèrement tout en s'inclinant.*

- C'est à moi de m'excuser, je crois que je gênais le passage. Je suis un incorrigible tête en l'air.

*Il la regarda plus calmement. Peut-être qu'elle pourrait l'aider. Après tout, la dernière fois il y avait la Marquise. Peut-être que Claude savait des choses qu'elle ne pouvait dire devant une personne aussi prestigieuse qu'Athénaïs de Montespan.*

- Pardonnez-moi Mademoiselle... Mais auriez-vous quelques instants à m'accorder ? Sauf si vous êtes pressée, et je comprendrai. Je ne voudrais pas vous mettre dans l'embarras.

Claude le jaugea du regard... si elle paraissait trop pressée, il pourrait en déduire qu'elle avait de choses à cacher, aussi préféra-t-elle lui adresser un sourire poli et lui répondre sur une voix aimable.

-Non, je ne crois pas avoir des choses à faire, où voudriez-vous que nous parlions?

Du plat de la main, elle lissa sa robe et remit en place quelques mèches rebelles qui s'étaient échappées de son chignon. Elle vit que le policier avait tenté de soigner sa tenue afin de passer davantage inaperçu dans les couloirs de Versailles, mais ce n'était pas très réussi. D'autant que passer inaperçu de tous à Versailles était impossible, impossible de se déguiser en noble, tout le monde connaissant tout le monde au moins de nom et de vue, et même les nouveaux arrivants étaient déjà connus. Chez les domestiques, on fuyait la police comme la peste et si on se déguisait en domestique, personne ne vous connaissait, et par conséquent ne vous faisait confiance. Mener l'enquête dans Versailles était quasi-impossible à moins d'avoir un allié dans la place. Claude pensait savoir à peu près ce qui se passait dans la tête du jeune policier, et si elle avait raison, cela allait servir les interêts et ceux de sa maîtresse, car cela lui donnerait une bonne raison pour se rendre chez la Voisin sans éveiller les soupçons. Restait à savoir si elle avit raison...

*Alban sentit le regard inquisiteur de Claude sur lui. Il évita de baisser le regard afin de jauger de sa tenue. Inutile d'essayer d'arranger les choses. Il était habillé comme il était, et même s'il se déguisait en domestique, à Versailles il savait que l'étiquette "Attention, policier en service" était collée sur son front. C'était assez énervant. Dans le lieu le plus peuplé, il n'arrivait pas à passer inaperçu. Un comble, vraiment.
Il s'efforça de garder le sourire. Inutile d'effrayer la femme de chambre, surtout qu'elle acceptait de répondre à ses questions. Il comptait bien profiter de l'occasion, afin d'avancer dans son enquête. Depuis quelques temps, il ne rencontrait que des voies sans issues. Trouver la bonne route ne lui ferait pas de mal.*

- C'est gentil à vous... Je crois qu'il faudrait s'écarter du passage afin d'éviter les accidents. N'importe quel endroit conviendra.

*Il commença à s'écarter pour aller près d'un des murs, afin de ne pas gêner les passages incessants des domestiques, et sortit son sempiternel petit carnet.*

- Je voulais savoir... il n'y a pas eu d'événement étrange ces derniers temps ?

Claude suivit le policier, curieuse de savoir si ses intuitions étaient bonnes. Elle éclata d'un rire moitié forcé moitié sincère à la première question du policier;

-Mais monsieur, tout est étrange ici! De quoi voulez-vous parlez, en particulier?

Claude jouait à moitié les idiotes, si elle s'était écriée que la mort de celui-ci était suspecte ou la maladie d'un autre était un empoisonnement, on aurait pu déduire qu'elle en savait plus qu'elle ne le laissait paraitre. Elle fit un petit sourire en coin afin de préciser qu'elle n'était pas dupe. Elle se pencha vers Alban et murmura:

-Je pense savoir pourquoi vous êtes ici, Monsieur, mais les domestiques ne vous dirons rien, et les rumeurs qui courent ne contiennent qu'une petite part de vérité...

Elle se redressa comme si de rien était et jeta un oeil dans le couloir afin de vérifier que personne ne les épiait ni ne les écoutait. De mauvaises informations pourraient parvenir à l'oreille de sa maitresse et elle serait congédiée, tandis que si elle le lui annonçait elle-même, sa maitresse la féliciterait sans doute!

*Est-ce que Claude le prenait pour un imbécile ? Il ne faisait que son travail. Ses enquêtes piétinaient, et il commençait à perdre patience. Il attendait avec impatience le moment où il pourrait s'écrier qu'il avait enfin trouvé le coupable de toutes ces agitations à Versailles, et qu'il pourrait envoyer ce dernier à la Bastille. Hélas, ce moment semblait être de plus en plus lointain. Comment faire ? Il aurait voulu au moins un petit indice pour prendre une direction ou une autre. Il se sentait de moins en moins à l'aise ici. Tout allait trop vite. Les affaires et les demandes d'enquêtes se multipliaient avant qu'il ne puisse en résoudre une seule. Il savait que tous les policiers étaient dans cette situation, mais cela restait tout de même frustrant.
Il soupira et regarda Claude.*

- Je suis là pour chercher cette part de vérité justement. Je ne veux pas vous offusquer, mais personne ne prête attention aux domestiques, alors que ces derniers peuvent prêter l'oreille à toutes les conversations...

*Il la fixa. Elle semblait avoir beaucoup d'esprit, et il était sûr qu'elle savait beaucoup de choses. Il ne pouvait pas le prouver, mais il le sentait. Et il faisait confiance à son intuition.*

- Mademoiselle, je ne cherche pas à vous gêner, mais juste à comprendre. Vous ne nierez pas que des gens manquent de se faire empoisonner à chaque instant. Je veux que cela cesse. Je veux des noms. Savoir qui serait susceptible de fournir ces poisons. Les domestiques sont de bons intermédiaires, non ? Discrets dans la foule Parisienne...

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